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2ème partie – Évangiles de l’enfance
J’ai décidé d’écrire, moi aussi... (Luc 13)
Le procédé littéraire du montage en parallèle ne présente pas de difficulté spéciale lorsque l’on compare un contemporain à tel ou tel grand ancêtre. Cela permet de mettre en valeur celui qu’on veut louer. Mais lorsqu’il s’agit de juxtaposer des personnes dont les vies se sont croisées c’est plus délicat. D’autant plus que les disciples de Jean considèrent que leur héros est supérieur à Jésus : plus âgé il a baptisé le plus jeune dans le Jourdain. Et Luc va réussir avec une particulière élégance à affirmer la supériorité de Jésus sans jamais dévaloriser le baptiste. Les scènes des annonces et les scènes de naissances se répondent avec aisance.
Mais l’attention de l’auteur se porte surtout sur les interventions de l’Esprit Saint tout au long de ces deux chapitres.
Que voilà un indice précieux pour découvrir le secret de la composition de Luc : il n’écrira cette introduction des deux premiers chapitres que dans la lumière de la Résurrection qui donne sens à tout le déroulement de l’histoire. C’est un peu comme si Luc avait profité des conseils que je donnais autrefois comme professeur de Philosophie pour rédiger des dissertations : ne commencez à écrire votre introduction que lorsque vous aurez rédigé votre conclusion !
Et c’est ainsi que Luc peut nous guider d’une main sûre dès ces deux premiers chapitres car il a les yeux fixés sur la lumière de Pâques – toute son introduction annonce les grands thèmes de l’œuvre entière.
Une observation s’impose : nombreux sont les personnages de cet évangile de l’enfance qui ont droit à une révélation sur le rôle à venir de Jésus.
Ainsi les bergers de la crèche raconteront ce qui leur avait été annoncé à de nombreuses personnes ; Anne parle de l’enfant à tous ceux qui attendent la libération de Jérusalem ; de nombreux docteurs de la loi sont témoins dans le temple de l’intelligence et des réponses de Jésus âgé de 12 ans. Or tout ce savoir sur Jésus est totalement inconnu des personnages mis en scène à partir du chapitre 3.
Cela souligne le décalage qui existe entre ce que disent du Christ l’évangile de l’enfance d’une part et le reste de Luc de l’autre. Si Luc 1 et 2 annonce déjà toute la foi de l’église c’est que ces deux chapitres sont illuminés par la foi pascale et qu’ils la mettent en œuvre. La messianité et la seigneurerie de Jésus que l’ange annonce aux bergers, voila bien en effet le message que proclamera Pierre après Pâques : « Dieu l’a fait Seigneur et Christ, ce Jésus que vous avez crucifié » Ac 236.
La fonction des deux premiers chapitres de Luc paraît claire. Il s’agit d’un prologue, d’une ouverture où l’évangéliste prépare son lecteur à la découverte de la véritable identité de Jésus. Celle-ci ne sera pleinement perçue qu’après Pâques. L’enfant de la crèche est déjà le Christ Seigneur de la Résurrection.
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Publication : 17 mars 2010
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